La façon de voir et de traiter nos « vieux » est révélatrice de notre société. Ces personnes maintenant âgées, qui ont peiné pour nous, nos parents, nos grands-parents, nos ancêtres, nos aïeuls doivent garder leur véritable place. Ce texte leur est dédié. La preuve que vieillesse et modernité peuvent coexister… grâce à nous.
Mémoire et oubli
« Ce matin, ma plume attendait patiemment près de la page blanche que je lui demande de se mettre au travail.
Je lisais les messages divers qui s’affichaient sur l’écran de l’ordinateur, sans lui accorder la moindre attention, quand j’ai perçu un soupir suivi d’un long gémissement !
Intriguée, j’ai regardé dans la direction de ce bruit insolite ! Ma plume, le nez plongé dans une flaque d’encre noire, pleurait à chaudes larmes!
– Que t’arrive-t-il, lui ai-je demandé ?
– Rien de grave, a-t-elle répondu entre deux sanglots !
– Mais encore, ma chérie, dis-moi ce qui ne va pas !
Le silence a suivi ma question ! J’ai attendu sans la bousculer qu’elle me dise le pourquoi de son chagrin !
Enfin, toute barbouillée de larmes elle a répondu :
– Tu vois, je me fais vieille: peu de monde a encore besoin de moi, les écrivains comme toi préfèrent utiliser le clavier de l’ordinateur plus rapide, plus facile à manipuler, je sais que tôt ou tard, je finirai au fond d’un tiroir où l’on m’oubliera jusqu’à ce que, objet devenu inutile, je sois jetée dans une quelconque poubelle pour être incinérée !
Non, ne dis rien ! Ce n’est pas sur mon sort que je verse des larmes; je suis depuis longtemps résignée à quitter tôt ou tard cette terre pour rejoindre la lumière !
Plus de câlins
Je pense à tous ces humains devenus vieux, usés par le travail, qui ont donné leur amour à des ingrats qui les laisse croupir dans des homes sinistres, sans jamais leur rendre visite, sans jamais se soucier de leur sort, sans plus jamais leur faire un câlin. Ces pauvres n’ont plus d’espoir, ils attendent la mort comme une délivrance, je trouve cela injuste et cela me rend triste !
A ces mots, moi aussi j’ai eu envie de pleurer. Je l’ai prise dans mes doigts, j’ai essuyé son nez tout dégoulinant et je l’ai serrée un peu plus fort, en lui faisant comprendre, qu’elle ne connaîtrait jamais le sort qu’elle redoute !
Je ne suis pas ingrate, c’est avec une autre plume, semblable à celle que je tiens à la main, que j’ai appris à écrire, il y a bien longtemps.
C’est grâce à une plume que j’ai pu commencer à rédiger des histoires qui réjouissent les cœurs ! Jamais je ne délaisserai cet objet inanimé qui m’a tant donné et qui possède plus d’humanité que certains frères humains !
Méditez…
Mes amis, méditez cette histoire, prenez le temps de montrer votre amour à ceux qui vous sont proches, ne les abandonnez pas parce qu’ils sont vieux et inutiles aux yeux d’une société qui a oublié les vraies valeurs ! Ils sont la mémoire du passé, ils se sont sacrifiés pour nous et nous ont permis d’être ce que nous sommes. A ce titre ils ont droit à notre amour et à notre reconnaissance !«
Ghislaine Jermé est née à Liège le 15 novembre 1946. Etudes de médecine puis de droit, cette auteure a été avocate et juriste avant de se consacrer à sa passion: l’écriture.
Site de Ghislaine Jermé