Vincent Peillon et la réforme de l’école primaire

Mon rythme ou la politique, que choisir?

Mon rythme ou la politique, que choisir?

OUI à la réforme sensée, NON à la réforme précipitée et bâclée

Le ministre de l’Éducation Nationale vient de finir son discours concernant la réforme scolaire sur France Inter (Quels rythmes à l’école pour nos enfants ?).

Il a, une fois de plus, fait fi des revendications et demandes du peuple français.

Fait fi des témoignages des personnels : enseignant, municipal, territorial qui, eux, savent… en tous les cas, mieux que lui. Parce que ces hommes et ces femmes sont sur le terrain, au milieu des enfants, dans les classes, au réfectoire, à l’accueil du matin et du soir, avec les enfants, pendant que ces derniers jouent, étudient, réfléchissent, mangent, et pour les plus petits, font pipi… Ils y sont parce qu’ils aiment, pour la plupart, leur profession.

Notre ministre ose dire que certains ne pensent qu’à leur intérêt personnel…

Soit, nous sommes d’accord : une toute petite minorité de personnes se fichent royalement de la fatigue des enfants à l’école préférant conserver leurs deux jours de week-end en rayant le samedi matin comme possibilité de se rendre 2 ou 3 heures à l’école (seraient plutôt pour : les commerçants, certains enseignants et parents; seraient plutôt contre : les familles recomposées dont la situation est parfois difficile et les parents qui préfèrent conserver leur week-end.)

Mais, comme le dit si bien Vincent Peillon: « Replaçons l’enfant au centre du débat ! ».

Par conséquent, pourquoi Monsieur Peillon, ne prend pas le temps d’écouter ce que les parents, les professionnels de l’enfance, les enseignants, les Atsem, les animateurs lui conseillent : ils l’invitent, ils l’incitent, ils l’implorent de prendre le temps de réfléchir en posant sur la table le mot ENFANT, et ensuite, de faire rayonner autour de lui les différents acteurs de son éducation.

Dans les autres pays

C’est très joli et ça fait sérieux de comparer la manière dont les autres pays s’organisent autour de l’école, mais c’est souvent hors de propos. Les autres nations n’ont pas la même histoire, la même culture, le même rythme.

Comparons ce qui est comparable:

  • Dans un pays comme l’Allemagne, où la femme est incitée à rester à la maison car les modes de garderies sont rares, il est plus simple de ne faire école que le matin. La mère est plus facilement présente avec l’enfant quand il n’a pas d’activités ou cours l’après-midi (un exemple frappant: « la plupart des écoles allemandes ne disposent même pas d’une cantine »; in Le Monde du 25 mai 2010 sur le sujet)

En France, où femmes et hommes travaillent tous les deux, l’après-midi libre est beaucoup moins simple à gérer.

  • Dans des pays nordiques, où la société s’est davantage articulée sur le rythme de l’enfant et dont le système scolaire met fortement l’accent sur la fonction d’intégration de l’école, il est plus aisé d’opérer des changements au sein de l’éducation et de ses rythmes.

En France, où le travail (ou le chômage) est roi, la parité s’est installée et les enfants sont confiés à des structures spécialisées (crèches, écoles, éducateurs et animateurs…)

(Pour en savoir + sur l’école en Europe, quelques chiffres sur ce site)

Qui va payer?

Le ministre « préconise, recommande aux collectivités locales de rendre les activités périscolaires gratuites […] car ça n’est pas la scolarité obligatoire. »

« L’État français donne de l’argent pour financer les activités périscolaires… »

Pour combien de temps? A hauteur de combien? A quelles conditions?

Il faudrait payer les communes pour mettre en œuvre les décisions sur la réforme éducative de la gauche?

Et que signifie: « L’État abonde en argent des collectivités locales? » dixit le même ministre de l’Education, Vincent Peillon, ce matin sur les ondes.

Pas de réponse quant à la question de la qualité des activités mises en œuvre…

Vincent Peillon sur France Inter, le 04/11/2013

Mépris et ironie de la part de Vincent Peillon

C’est une hérésie.

Il n’y a vraiment aucun mépris de la part de nos dirigeants envers ceux qui se préoccupent de ce problème?

Le ministre prétend que cette réforme n’entraînera aucun coût pour les parents? Il fait allusion à une certaine instrumentalisation de la part de ses détracteurs… Mais qu’on nous dise qui est prêt et d’accord pour débourser les euros nécessaires à cette réforme.

Qui peut donner de son temps bénévolement pour éduquer, initier nos enfants au théâtre, à la musique, au dessin, au sport, aux activités manuelles et artistiques? (Nombres associations se sont entendues demander, de la part des communes, si elles pouvaient intervenir gratuitement dans l’école, mais hors temps scolaire!)

Parce que, Monsieur Vincent Peillon, QUI doit payer si le gouvernement ne le fait pas ? Et si l’État n’a pas les moyens de le faire, comment les autres financeurs éventuels le pourraient-ils (municipalités entre autres)?

QUI, en ces temps de crises, peut rémunérer des animateurs compétents et pédagogues ? Là réside tout le problème, le fossé entre les paroles, les promesses et les actions réelles à mettre en place!

Calendrier des médias

Vous affirmez, face à Patrick Cohen sur France Inter ce matin (station radio à qui je pose la question: pourquoi cet entretien avec le ministre de l’Éducation Nationale a t-il lieu un lundi de rentrée? A cette heure d’écoute où les principaux intéressés, ne peuvent entendre!), vous affirmez que les ATSEM (Agent Territorial Spécialisé des Écoles Maternelles) ont commencé à s’occuper des enfants le matin et le soir en périscolaire, à cette rentrée 2012/2013. Savez-vous qu’elles se chargent (c’est un métier essentiellement féminin) depuis bien longtemps de l’accueil périscolaire, matin, midi et soir, de 7h à 19h ? Le saviez-vous ? Elles ne vous ont pas attendu, sauf votre respect! Et elles ont, en effet, besoin d’un relais spécialisé.

Déception, mais espoirs, d’une maman, enseignante, et reporter indépendante

Votre discours, ce matin sur France Inter, m’a profondément déçue : je suis enseignante, animatrice, éducatrice, parent et reporter indépendante à mes heures perdues.

Ces minutes passées à vous écrire via cet article ne seront pas vaines et perdues si vous en tenez compte.

J’aurai au moins tenté de vous persuader, vous et votre équipe:

– De prendre davantage le temps d’écouter attentivement les gens qui sont sur le terrain des enfants et avec eux : la communauté éducative constate et prend note (par exemple, que leurs enfants ne supporteront pas de se lever un matin de plus pour aller à l’école, si leurs journées ne sont pas allégées de façon cohérente),

– De prendre davantage le temps d’écouter les gens qui vous disent que leurs élèves sont suffisamment mis sous pression pour ne pas en rajouter

– De prendre davantage le temps et d’éviter d’aller droit au mur, en permettant à la droite de vous reprendre les rênes des mains en se gaussant: elle pourrait vous reprocher de ne pas avoir mûrement réfléchi cette réforme.

De prendre davantage le temps AVEC toutes les personnes du terrain qui savent, elles.

« Tout ne se fait pas en un mois, surtout les grandes réformes » dit Vincent Peillon, tout ne se fait pas en quelques mois non plus.

L’Éducation Nationale française va mal

Cette décision de changer l’école, ses rythmes, son fonctionnement en profondeur, vous l’avez déjà commencée. Toutes les personnes censées et concernées ou non directement sont d’accord : le monde de l’éducation en France va mal et c’est de pire en pire chaque année, mais elles vous suivront si vous leur permettez de s’exprimer. Chacun a pu y réfléchir, le temps est venu maintenant de synthétiser AVEC ELLES le fruit de leur concertation.

Vous devez attendre que l’information circule et tenir compte de chaque avis et commentaires qui s’appuient sur le vécu actuel des ENFANTS, des ÉLÈVES, des adultes en devenir : nos enfants.

Il était temps de réformer l’institution de l’Éducation, de la faire évoluer… mais, s’il vous plait, dans le bon sens.

Nous ne sommes pas des marionnettes à qui l’on fait croire n’importe quoi!

La réforme des rythmes scolaires 2013 ne sera marquante et n’aura de sens qu’en révolutionnant profondément les rapports entre les activités scolaires, périscolaires et les vacances. Les enfants ne sont pas des pions que l’on déplace au gré des études qui se succèdent et qui ne se ressemblent pas.

Je reprendrai ici, un article du Monde, par la voix de Bernard Gauducheau « Une réforme du temps scolaire doit être mûrement réfléchie et ne pas céder aux sirènes des débats médiatiques et aux dérapages de la polémique. Elle doit contribuer au juste équilibre entre le rythme de l’enfant, la répartition des vacances sur l’année, les contraintes parentales, le temps libre laissé aux familles, les contenus éducatifs et l’apport des activités périscolaires des mairies et des associations. En attendant de trouver un réel consensus, conservons la semaine de quatre jours pour en tirer des enseignements concrets tout en préparant une véritable réforme. »

Valérie Doulevant